vendredi 20 janvier 2017

De douloureux adieux

Un attachement rapide rend le retour à la réalité tout aussi difficile et brutal, quel que soit le type d'attachement que l'on puisse éprouver. 

Aujourd'hui, je dois faire le deuil du bien-être que j'ai ressenti les quelques fois où j'ai vu la psy pour faire ce qu'on appelle un bilan psychologique (avec entretien et tests de QI, j'y reviendrai). Une écoute sincère et bienveillante, quelques aspects évoqués parmi ceux qui me touchent le plus profondément, quelques questions soulevées, quelques petits conseils éparses, et c'était déjà fini. 

La restitution est faite, il est à présent temps pour moi de poursuivre ma route. Elle me conseille de commencer une thérapie pour réduire le niveau d'anxiété ou, comme je le lui dis, pour mon problème d'obsession de la nourriture (sans que cela ne rentre dans le cadre d'un trouble alimentaire spécifique, depuis que j'ai stoppé net l'hyperphagie). Ce ne sera en tout cas pas avec elle : elle évoque des centres où les étudiants peuvent consulter un psychologue gratuitement, et de toute manière elle a une spécialisation bien spécifique qui ne correspondrait pas à ce que je pourrais chercher moi. Elle me conseille néanmoins un podcast sur l'attachement, puisque je lui ai demandé une référence théorique (j'y reviendrai aussi).

Je ne l'ai vue que quelques fois, cette psy, 5 rendez-vous au total étalés sur plusieurs mois. Cela fait donc un moment que cette aventure m'accompagne, que j'y pense, que ça m'interroge, que ça m'ouvre l'esprit, que ça me travaille.

5 rendez-vous seulement, et pourtant ça a suffi. Ca a suffi à créer une sorte de vide immense quand je suis sortie de son bureau pour la dernière fois, déçue que les tests n'aient pu conduire à aucun diagnostic clair (pour faire simple, si je devais résumer ma situation, ce serait un fonctionnement haut potentiel sans haut QI, autrement dit aucune étiquette ne s'applique réellement à moi) mais surtout triste à l'idée de ne plus jamais y revenir. Les quelques discussions que nous avons eues, lorsqu'elles allaient au-delà de la simple notion de restitution pour évoquer brièvement les problèmes dont je lui avais fait part, m'ont plongée dans des émotions particulières. Peut-être parce que cela leur permettait justement d'être exprimées face à une oreille attentive au regard fin et bienveillant, leur donnant la possibilité de rejaillir à la surface. Ces émotions, pourtant, j'en avais déjà parlé à mes parents et à des amies. Mais là c'était différent. 

Je me sens comme je me sentais il y a quelques années, lorsque je refermais le dernier tome du Livre des étoiles et que je devais quitter ce monde et ces personnages que je chérissais tant, n'ayant plus que mes larmes pour affronter ce qui m'apparaissait comme un drame. A ceci près que les larmes ne sortent aujourd'hui pas toujours et qu'elles laissent place, lorsqu'elles sont retenues, à une profonde angoisse teintée de tristesse, ou une tristesse teintée d'angoisse. Je vais pour écouter le podcast, et tout à coup un sentiment de panique me prend, mon cœur se serre, je peux, je ne peux pas, je veux, je ne veux pas, je ne sais pas, je ne sais plus, c'est un peu tout ça la fois. Comme si le fait d'aller sur cette page et cliquer sur play me rapprochait trop de ces émotions désagréables, ramenant ma conscience à ce constat douloureux : l'adieu. C'est l'Adieu qui s'empare de moi lorsque j'ouvre la page, en même temps qu'une profonde envie d'écouter l'émission que la psy m'a conseillée pour m'éclairer, moi, dans mon cas personnel. J'ai l'impression que mon esprit se débat intérieurement, mais contre quoi ?

Peut-être contre lui-même. 
Je m'attache trop difficilement, parfois. 
Je m'attache trop facilement, là. 
Ces adieux font mal alors que ça n'a été l'affaire que de quelques rendez-vous. 
J'ai l'impression d'être comme lâchée tout à coup dans un grand océan, moi et mes émotions, sans bouée de secours à laquelle me raccrocher lorsque je peine à les maintenir à la surface. 
Pourtant ma vie ne va pas mal, je ne vais pas mal. 

Mais cet adieu, lui, me fait mal, et moi je peine à exprimer toutes les émotions que j'aimerais tellement comprendre et expliciter, pour ne plus être seule parmi elles.
Moi, incapable de les comprendre complètement.
Elles, inaccessibles à ma raison.
Et ce non diagnostic bouleversant qui me laisse livrée à mon errance.