vendredi 4 janvier 2013

Ma peur véritable

J'aimerais croire qu'en quelques secondes, tout a changé. Que, l'espace d'une nuit, des étincelles se soient animées. Qu'une petite flamme ait brillé, créant en grandissant un espoir qui n'existait pas encore. Qu'un changement se soit opéré, qu'il nous ait ouvert les yeux, qu'il nous ait donné de nouvelles armes pour affronter la vie. Ce n'est pourtant qu'un chiffre qui change, janvier qui revient, et la vie qui continue sa course. Mais, puisqu'on a tous besoin de symboles, je vais considérer que ce simple 2 qui se transforme en 3 est l'occasion de prendre un nouveau départ, de laisser dernière moi cette année éprouvante qu'a été 2012 et de faire en sorte que chaque jour contienne un peu de magie.
Nouvelle année, nouveau départ ? Je me suis pourtant réveillée le premier janvier accompagnée de la même tristesse, de la même joie et des mêmes angoisses ; aussi sensible, aussi émotive, toujours capable de verser des torrents de larmes pour des choses anodines ou de sauter de joie pour des faits presque insignifiants. Je ne sais si cette sensibilité est un cadeau merveilleux ou empoisonné, toujours est-il que cette nuit là, mes craintes n'ont pas disparu. Il y a certaines peurs qui dès ma plus tendre enfance m'ont tourmentée. Jamais pourtant je n'ai saisi ma plume pour me vider le coeur, jamais non plus je n'ai osé en parler, comme si mettre des mots sur mes peurs et les exprimer pouvait les rendre plus vraies encore. Un malaise s'emparait de moi dès que j'envisageais la possibilité de me confier à mes parents, à un ami. Alors, pour ne pas que mes craintes - communes à tout être humain - se propagent tel un puissant virus, pour ne pas être jugée, pour ne pas avoir à y penser plus souvent, la petite fille encore à l'aube de sa vie que j'étais s'est tue. Et pourtant, j'en ai versé, des larmes. Il n'était pas rare que le soir une énorme boule d'angoisse me serre le ventre, me poussant à pleurer encore et encore jusqu'à m'endormir d'épuisement après m'être vidée le corps de ces milliers de larmes qu'il contenait. Seule dans le noir, allongée sur son lit, une petite fille triste et effrayée par l'avenir pleurait. Les minutes passaient mais elle ne s'arrêtait pas. Son visage pourtant finissait par se détendre alors qu'elle s'abandonnait enfin au sommeil et se laissait entraîner dans des mondes oniriques. Au petit matin, quand l'enfant se réveillait, tout était oublié, ses peurs retirées dans un petit coin obscur de sa mémoire. Elle allait mieux, et ce jusqu'à ce qu'une nouvelle crise de larmes, quelques jours, quelques semaines plus tard, se manifestât.
L'objet de cette angoisse, je peux le résumer en un seul mot : séparation. Ma peur véritable, la seule capable d'effrayer une enfant encore naïve et bercée d'illusions puis, dans une moindre mesure, une adolescente qui bientôt découvrira les joies de la majorité. J'étais, et je le suis encore, impuissante face à cette peur que je ne parvenais pas à combattre. Quelles craintes étranges pour quelqu'un qui n'a jamais connu la perte d'un être qui lui est cher ! Des pensées m'envahissaient, des images apparaissaient devant mes yeux clos. Plongeon dans le futur, terrible vision : une Esmeralda ridée, abattue par la vie, anéantie par les pertes successives des êtres aimés et sans espoir de retrouvailles dans un au-delà auquel elle ne croit pas. Seule et sans parents (et voilà que les larmes venaient à cette seule perspective), et les amis d'aujourd'hui depuis bien longtemps perdus de vue. Ces images floues et obscures sont les raisons qui me font craindre la fuite du temps. Souffler ses bougies avec sa famille, ceux qui durant toute mon enfance m'ont aimée et chérie, c'est un merveilleux moment qui marque pourtant la fin d'une année - encore une.

Toutes les séparations m'affectent, des véritables ruptures aux séparations les plus anodines. Je me réjouis de bientôt retrouver telle personne pour noël, telle famille pour le nouvel an, et déjà, alors que le moment de faire la fête ne s'est pas encore manifesté, je pense à celui où je serais contrainte de me me séparer d'eux. Je vis dans le passé, je vis dans le futur. Toujours je vis dans la tristesse anticipée ou le manque de la personne que j'aime tant. J'essaie de chasser ces pensées de mon esprit et de simplement attendre, c'est si difficile pourtant, peut-être que je m'attache trop. Et ces cruelles questions "Quand le reverrai-je, combien de temps, combien de fois ?", elles sont effrayantes ces questions, quand le moment des retrouvailles ne dépend pas uniquement de ma belle volonté.Je déteste l'incertitude, je veux savoir quand je les reverrai, que ce soit dans une semaine ou dans un mois, je veux savoir pour pouvoir m'accrocher à cette idée. Les idées ça aide à tenir, ça soutient le moral souvent affecté par le stress et la déception. Ca soulage, ça rassure.

Je vis très mal toute forme de séparation. Beaucoup se sont étonnés de ma décision sans appel d'étudier dans ma ville au moins les deux prochaines années, sans même considérer les belles opportunités que pourraient m'offrir les universités d'autres villes. Mais je ne peux pas. Quitter du jour au lendemain mes amis, ma famille, mon environnement, c'est plus que je ne pourrai le supporter. Un jour j'aurai gagné suffisamment de maturité pour prendre mon envol, mais aujourd'hui je suis encore trop fragile. D'autant plus que d'autres questions se posent déjà : Quelles relations vont se défaire ? Arriverai-je à préserver celles qui comptent le plus que moi ? Comment vais-je vivre l'absence des amis qui l'année prochaine étudieront dans une autre ville ?

Oui, je vis très mal toute forme de séparation. C'est triste, mais c'est aussi le plus beau. N'est-ce pas merveilleux d'avoir dans son entourage un certain nombre d'êtres qui nous sont assez chers pour que les larmes nous viennent de ne pas les voir suffisamment ? Je ne peux que les remercier mille fois pour cela. Alors, même si une partie d'entre eux ne verront jamais mon message, je remercie très fort ceux qui font que la vie est si belle, la famille, les amis. Et j'envoie également des remerciements virtuels à vous qui me lisez, qui écrivez, qui par les mots arrivent à me réconforter un peu lorsque je suis triste, et qui me donnent des conseils. Une relation virtuelle ne remplacera jamais une vraie relation, mais pourtant quel monde merveilleux c'est ! Merci, merci profondément à vous tous.

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