dimanche 17 février 2013

Telle est ma quête, suivre l'étoile...

Lévi-Strauss a expliqué pourquoi aller observer une civilisation pouvait la modifier. Le simple fait que nous soyons présents changera sa façon de se comporter. Je pourrais appliquer ce schéma à ma ma propre analyse. En réfléchissant autant à ma personnalité, je risque de me changer, de ne plus me comprendre, de ne plus être ce que je suis. En voulant trop me connaître, en voulant trop me transformer en la personne que je voudrais être, je risque bien de me perdre. Pendant les vacances de noël j'ai eu l'impression de me retrouver. Mais à trop vouloir être fidèle à moi-même, je ne sais plus quel est ce moi-même que je poursuis. Je ne sais pas s'il existe une sorte de moi qui me corresponde, et qui fera que je me sentirai à ma place, en harmonie avec moi-même. Ou si cette idée du moi en accord avec lui-même n'est qu'une illusion et que mes caractéristiques ne sont que des éléments indépendants qui forment un tout hétérogène et bancal, aussi fragile qu'un château de carte qui peut être reconstruit mais qui sera toujours un peu différent du château précédent et tout aussi fragile. Les traits individuels sont bien solides, on les reconnait, mais en s'assemblant il n'y a pas d'harmonie. Je repense à ce qu'on  a dit en philosophie sur les qualités résultantes ou émergentes. Dans le premier cas, tout s'additionne et c'est tout. Dans le second cas en revanche, au moment de l'addition on observe de nouvelles caractéristiques. Je connais parfaitement bien mes caractéristiques individuelles.
 
Mais quelque chose cloche. Quelque chose que je n'arrive pas à définir. Je me reconnais, et en même temps je suis mal à l'aise, j'ai l'impression de sans cesse essayer de me tromper moi-même. Je ne crois qu'à moitié à l'image que je me suis créée. La fille qui adore la philosophie, qui aime lire et penser, qui voue une passion à la musique. J'ai l'impression que tout ça c'est du vent. La vraie moi, c'était celle qui ne réfléchissait pas trop, qui laisait de la fantasy à longueur de journée, qui adorait regarder des films le soir, qui s'en foutait pas mal d'être cultivée, qui refusait de lire des classiques parce que c'était l'ennui par excellence. Celle-là, si vous me l'aviez présentée, je l'aurais reconnue. J'ai fui en partie mon vrai moi, et il y a quelque chose d'irréversible dans cet acte, cette partie-là s'est perdue dans la crise d'adolescence et ne reviendra plus. Mais je ne suis pas non plus la personne que j'ai voulu être. Je n'ai pas encore réussi à l'atteindre. J'aime bien les classiques de la littérature, par exemple, mais je suis toujours paresseuse et c'est l'ordinateur que je continue de choisir. J'aime la philosophie, mais ce moi-là est surfait, j'aime en lire certes mais j'aime surtout en avoir lu et d'un autre côté ça m'ennuie un peu et ça me fatigue. Alors j'ai essayé de refaire un pas vers l'ancienne Eva, celle qui lisait de la fantasy avec passion ou qui regardait des films et des séries en étant comblée de le faire. Mais je n'ai plus ressenti la passion d'avant. Parce qu'une part de moi était reliée à l'autre moi que je me suis efforcée de créer. Le processus commence à être efficace. Il m'empêche de revenir en arrière, mais il ne m'a pas faite arriver au bout du chemin. J'ai essayé de faire coexister ces deux moi mais au final les deux sont faux, se chassent mutuellement, ce qui fait que je ne sais plus comment je dois être pour me sentir moi. Je n'arrive plus à aimer vraiment ce que j'aimais avant. Je n'arrive pas non plus à aimer vraiment ce qu'aime la nouvelle moi, celle que j'apprécie beaucoup mais qui n'existe pas encore. Je me connais mieux, mais je me connais aussi moins. J'ai trop évolué pendant mon adolescence, j'ai changé plus vite que la vitesse à laquelle j'ai été capable de m'analyser.
 
Ce que je voudrais, au fond, c'est atteindre l'idéal du Moi que je me suis créé : ce n'est pas un idéal que je veux atteindre parce que je me dévalorise actuellement, pas du tout, c'est plutôt comme un moi qui me correspondrait et sans lequel je ne me sentirais pas tout à fait bien dans ma personnalité. La personnalité, ça se crée. Je suis en train de construire la mienne et le résultat final attend peut-être patiemment que je le trouve. Je veux avancer et trouver mon idéal sans perdre trop de ce que je suis en chemin.  Je veux rester connectée à la Eva insouciante qui arrive à être heureuse comme jamais à la seule idée de voir bientôt un épisode de série, ou de lire un livre, ou de se balader sur internet.
 
Ce que je pourrais dire, au final, c'est que je suis mon propre objet d'expérience. Je ne veux pas que cette phrase ait quelque chose de prétentieux, mais je veux simplement dire qu'on peut aimer voir ce que les gens deviennent, comment ils s'adaptent à la vie, en faire une analyse sociologique et psychologique, mais que finalement ça marche aussi pour nous. Je veux porter sur moi un regard à la fois objectif et subjectif. Subjectif, c'est évident, puisque ce sont mes émotions, mes ressentis, mes pensées qui me guident. Objectif, parce que c'est aussi un regard extérieur que je veux poser sur moi lorsque je m'observe, pour ensuite ajuster mon comportement en fonction de ces observations, essayer d'en tirer des conclusions, mieux me comprendre pour enfin savoir si ce moi est atteignable, si c'est vraiment possible de se modifier soi-même à sa guise en fonction de ce qu'on veut être. C'est en cela que je suis mon propre objet d'expérience. Voyons maintenant où ça nous mènera.

6 commentaires:

  1. "La personnalité, ça se crée." T'as tout compris.

    RépondreSupprimer
  2. Haha oui en effet je suis bien soulagée d'avoir fini ce TPE! Et rassures toi, pour les questions, on a bien développé nos réponses, je ne voulais juste pas mettre tout un paragraphe pour chaque question ;)

    Pour revenir à ton article, c'est étrange car je me reconnais vraiment dans tout ce que tu dis! Il fut aussi un temps où je passais mes après-midi à regarder la télé ou jouer à l'ordi! Et oui, moi aussi a
    maintenant j'aime être cultivée, et j'aime "avoir lu" des livres, des chef-d'oeuvres de la littérature française! Mis à part le fait que je n'aime pas la philosophie (heureusement tu me diras, sinon ce serait flippant d'être ... pareil!). Et contrairement à toi, j'aime ce changement. Avant, vous m'auriez dit vacances de Février, j'aurais direct pensé : "me lever à 10h30 tous les jours, jouer à l'ordi 24/24 et faire mes devoirs le week-end de la reprise". Mais non, c'est bizarre, maintenant j'ai 'envie' de travailler, ça ne me rebute pas au contraire.

    C'est étrange tout ça. ;)

    RépondreSupprimer
  3. Je viens de me rendre compte que tu m'avais mise en lien d'amis :D Merci :) j'avais fait de même il y a un moment!
    D'ailleurs, je te préviens, même si tu le découvriras en venant sur mon blog, que je change de plate-forme! A vrai dire, je rejoins la même que ton blog ;)
    Voilà l'adresse : http://objectif-hypokhagne.blogspot.fr/

    Mais tu peux regarder mon dernier article ici : vielitteraire.canalblog.com

    RépondreSupprimer
  4. J'aime beaucoup ta façon de voir les choses, et ton introspection est ma foi très pertinente. Je te souhaite de te trouver, ce qui n'est pas une quête facile, et de vivre correctement avec ce que tu es. Pas tout le monde ne fait cet effort, beaucoup de gens portent un masque qui les dispense de fouiller en eux-même pour comprendre d'où ils viennent réellement.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci beaucoup pour ce gentil message. Je suis tout à fait d'accord avec ce que tu dis sur le fait que tout le monde ne fait pas cet effort, j'ai même l'impression que très peu le font, ce que je trouve dommage. Personnellement je n'aime pas du tout le déni et je suis bien incapable de me mentir à moi-même, je ressens un malaise dès que je me sens "en décalage" avec ce que je suis.

      Supprimer